Comment développer son esprit critique ?
QQCOQP : la
base !
Pour s’interroger sur la fiabilité d’une information, on
travaille le fameux QQCOQP :
- Qui est l’auteur de l’information, qui est concerné (par qui, pour qui, avec qui, contre qui) ?
- Quel est le message transmis (qualité et richesse du contenu, qualité de l’auteur, sources fiables citées, etc.) ?
- Comment l’information est-elle transmise : sous quelle forme (argumentaire, présentation, questionnement – réflexion, affirmation, etc.) ?
- Où l’information est-elle véhiculée : quel(s) média(s) (objectif ? indépendant ?), quelle est la source (personne, entreprise, association, gouvernement, etc.) et quels sont les réseaux en lien avec cette source, l’information est-elle confirmée / contredite ailleurs ?
- Quand l’information a-t-elle été publiée (origine ? évolution ? mise à jour ?). Est-elle obsolète ? Y a-t-il des anachronismes ?
- Pourquoi l’information est-elle publiée / diffusée : quel est le but de ce message (informer, convaincre, vendre, divertir, etc.) ?
Et on vérifie l’information sur d’autres sources dont on
s’assure de la fiabilité !
Attention au biais
cognitif
Il existe une multitude de biais cognitifs. Intéressons-nous
tout particulièrement à certains biais de jugement qui altèrent notre façon de voir
la « réalité » :
- Ancrage mental : influence laissée par la
première impression - Biais de confirmation : tendance à chercher à confirmer ce qu’on pense.
Ce biais de confirmation peut commencer dès la recherche d’information, dans la
façon de formuler l’interrogation, saisir les mots-clés, sélectionner ses
sources, etc. - Biais
d’internalité : accorder plus d’importance aux intentions et
émotions de l’orateur qu’à son discours ou à ses actes - Effet
d’ambiguité : tendance à éviter les options pour lesquelles on manque
d’information - Effet de
halo : perception sélective d’informations (on cherche à confirmer sa
première impression) - Effet
Stroop : incapacité d’ignorer une information non pertinente. - Illusion de
savoir : croire que l’on sait, sans éprouver le besoin de rechercher des
informations complémentaires qui mettraient à mal ces croyances
Les effets qui
peuvent nous tromper
De nombreuses stratégies manipulatoires et phénomènes
cognitifs (dont les biais de jugement vus de précédemment) peuvent nous
tromper :
- L’argument d’autorité (ou syndrome de la
blouse blanche) : croire en la véracité d’une information simplement parce que
la source fait autorité - L’effet cigogne : croire qu’une corrélation
est une causalité - L’effet bouche-à-oreille : principe des
rumeurs. On entend une information, on la diffuse à son tour sans la vérifier. - L’effet puits : plus un discours est creux, plus les auditeurs peuvent s’y
reconnaître et y adhérer - L’effet viral : découle de l’effet
bouche-à-oreille. Plus une information est diffusée, plus on a tendance à la
croire. - Le syndrome des faux-souvenirs : croire que
des informations sont vraies (« je l’ai vu et/ou entendu et/ou vécu et/ou
…) alors que cela ne s’est jamais produit. Ce syndrome peut être induit par
quelqu’un (manipulation) ou une forte à l’information - Le syndrome du poulpe : nier les informations
allant à l’encontre de sa pensée, malgré d’irréfutables preuves. Peut aller
jusqu’à une paranoïa (on cherche à me manipuler) ou une théorie du complot
(tout le monde ment). Plus on essaie d’aller à l’encontre de la pensée, plus la
personne se braque voire se radicalise. - Le syndrome Galilée : toute personne
prétendant à une pseudo-théorie la considère presque toujours comme
révolutionnaire, et s’estime par ailleurs persécutée. - Le syndrome Popeye : je l’ai lu/vu/entendu
dans plusieurs sources différentes, donc c’est vrai. - Le faux syllogisme (sophisme, pour tromper ;
ou paralogisme, faux raisonnement mais annoncé de bonne foi). Ex : Jésus est le fils de Dieu ; Joseph est le père de
Jésus ; Donc Joseph est Dieu
Quelques
conseils pour développer et aiguiser son esprit critique :
- Penser par soi-même : ne pas se reposer sur la pensée de ceux qui font autorité, mais se construire ses propres idées
- Développer une réflexion : ne pas tout généraliser, analyser chaque cas dans la particularité de son contexte
- Sortir de sa « zone de confort » : accepter d’aller dans une zone de non-savoir, d’incertitude, etc.
- Ne pas préjuger et accepter le débat : il faut chercher et accepter les points de vue différents.
- Se remettre en question : personne n’a la science infuse. Et vérité d’un jour n’est pas vérité toujours.
- Avoir conscience de et accepter ses limites. Accepter l’erreur et en tirer profit (pourquoi me suis-je trompé ?).
- Avoir conscience des biais cognitifs
- Montrer n’est pas prouver
- Une image (fixe ou animée) ou un son ne sont pas des preuves : cadrage d’une image ou vidéo, angle, contexte, commentaire, interprétation, montage, trucage, etc.
- Une information n’est pas une preuve : l’interroger à l’aide du QQCOQP, la contextualiser, etc.
- Ne pas confondre
- faits (réalité vérifiable) et opinion (jugement sur les faits)
- information (fait relaté pour informer) et infodivertissement (information mise en scène pour divertir, information comme prétexte)
- Gérer la confidentialité de ses données : sur Internet, les algorithmes des médias sociaux vous proposent des informations qui confortent votre point de vue (on vous pousse vers le biais de confirmation !)
- Réfléchir à l’auteur originel de l’information (d’où vient l’image, le texte, la vidéo, etc. à l’origine)
- Réfléchir au but de l’information (informer, émouvoir, convaincre, vendre, divertir, etc.)
- Comprendre les médias et leurs limites. Produire un média est la meilleure façon de les comprendre !
Pédagogiquement et
éducativement, que faire ?
Pour toutes ces recommandations, à vous de trouver des jeux
ou séances ludo-éducatives ou pédagogiques.
La pratique de l’enfant, l’expérience, le tatônnement
expérimental, sont essentiels pour qu’il développe son esprit critique.
De 3 à 10 ans : faire naître l’esprit critique
- Favoriser le questionnement de l’enfant :
ne pas leur apporter toutes les réponses, mais les laisser chercher. L’adulte
joue le rôle d’accompagnateur. - Leur apprendre à observer le réel. Cela les fera
s’interroger eux-mêmes et développera leur réflexion en s’appuyant sur des
éléments concrets. - Défaire les stéréotypes
De 11 à 18 ans : développer l’esprit critique
- Développer l’autonomie et oser penser par
soi-même : affirmer sa pensée en l’argumentant. - Etre capable de mettre en doute ses propres
convictions - Savoir écouter : accepter la parole de
l’autre, les opinions divergentes. - Accepter l’erreur, avoir conscience de ses
limites (ignorance, mauvaise connaissance d’un sujet, etc.) et avoir le droit
(l’intelligence) de changer d’avis. - Favoriser la curiosité : chercher à
comprendre par soi-même.
De 19 à 119 ans : continuer à développer l’esprit critique
- Développer ses connaissances en étant vigilant
aux biais de jugement et aux différents effets psycho-sociologiques. - Etre conscient que l’apprentissage est permanent
et accepter ses limites. - Savoir s’adapter : Etre conscient de
l’évolution de la société et de la façon de recevoir / chercher des
informations - Tirer profit de l’erreur (tant dans la modestie
que dans le contenu de l’erreur) - Accepter et même favoriser le dialogue pour
échanger ses points de vue. - Accepter de changer de point de vue mais en
étant très vigilant à ne pas succomber à des techniques de manipulation (émotion,
rhétorique, etc.) - Interroger la notion de « vérité »
- Sortir de sa « zone de confort »
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