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Affaire Tom A. : il se fait usurper et voler sa vie

RESEAUX SOCIAUX – Les réseaux sociaux, mal utilisés, recèlent de dangers. Tom A., jeune homme de 22 ans, s’est vu usurper non seulement son identité, mais également sa vie réelle à cause des milliers d’informations personnelles qu’il a communiquées sur Facebook.

Tom A.
Tom A. : enlevé et séquestré, il se fait voler 6 mois de sa vie à cause de Facebook !

Tom A. est un jeune homme de 22 ans vivant dans la région Lyonnaise. Il s’est inscrit sur de nombreux réseaux sociaux, et notamment Facebook dès 2008 (il avait alors 15 ans). Dès son inscription, il a commencé à raconter toute sa vie. Tout d’abord sa vie au collège, puis au lycée, puis sa recherche d’emploi et son premier job. Mais il ne racontait pas seulement sa vie professionnelle puisqu’il détaillait jour après jour l’intégralité de sa vie personnelle.

Tom A. a ainsi alimenté un compte Facebook riche aujourd’hui (son compte est actuellement suspendu) de plus de 10.000 contributions texte (en moyenne 4 par jour), de près de 1.500 photos et environ 220 vidéos. Tom A. a ainsi complètement relaté sa vie sur Internet, de sorte qu’on savait tout sur lui. Cela est d’autant plus grave qu’il avait laissé son profil totalement public !

Face à cette porte ouverte aux dangers laissée par Tom A., un individu a fait une exploitation de l’intégralité de ces données, pour usurper l’identité de Tom. Ce dernier nous explique :

“Au mois de novembre 2013, j’ai découvert que quelqu’un se faisait passer pour moi. Je recevais des commandes que je n’avais pas passées, je recevais des réponses à des mails que je n’avais jamais envoyés et plein d’autres choses encore. Jour après jour, ça devenait de pire en pire, alors j’ai décidé de porter plainte le 20 novembre 2013. Les policiers m’ont conseillé de fermer temporairement mes comptes sur les réseaux sociaux. C’est ce que j’ai fait. Tout s’est alors arrêté.”

Tom A. se croit alors tranquille, et rouvre son compte Facebook notamment, à la fin du mois de décembre 2013. Mais les problèmes se font de plus en plus graves :

“En Juillet 2014, les ennuis ont recommencé. Mais c’était largement pire puisque je recevais des lettres de tribunaux et d’huissiers pour des délits que je n’avais pas commis. Je suis retourné déposer plainte. Et là encore ça s’est arrêté”.

Tom A. recrée alors un nouveau compte en septembre 2014, qu’il protège tant bien que mal :

“J’avais créé un tout nouveau compte, bien protégé, et dont les publications n’étaient accessibles qu’à mes amis. Le problème est que j’avais des milliers d’amis, dont plein que je ne connaissais pas”.

En effet, parmi ses “amis” se cachait une personne mal intentionnée (vraisemblablement celle qui avait déjà volé l’identité de Tom), qui cette fois ira beaucoup plus loin en volant la vie réelle de Tom A. Celui-ci, fébrile, nous raconte :

“Le jeudi 4 décembre, vers 22 heures, quelqu’un frappe à la porte de mon appartement. J’ouvre et … je me fais kidnapper ! On m’emmène je ne sais pas trop où et je reste enfermé durant près de 6 mois sans que personne ne vienne me chercher ! C’était terrifiant, j’avais faim, on m’insultait, je ne voyais pas la lumière du jour, …”

Si personne ne cherche Tom A., c’est qu’un usurpateur incarne sa vie : il s’installe dans son appartement, porte les mêmes vêtements, arbore le même style, etc. Les policiers n’en revenaient pas tant les 2 personnes se ressemblaient :

“L’usurpateur de Tom A. ressemblaient comme deux gouttes d’eau à Tom A. On comprend pourquoi tout le monde s’est laissé berner ! Un embonpoint, un comportement semblable, les mêmes vêtements, tout était pareil. “

En effet, l’usurpateur de Tom A. va au travail de Tom, fais les courses au même endroit, va à la banque en utilisant les comptes de Tom, rencontre les mêmes amis, etc.

Martial Ba, policier enquêteur sur les délits numériques, nous explique ce qu’il s’est passé :

“Tom A. avait un très gros défaut : tout publier sur Internet. Pourtant, il a eu 2 avertissements avec les usurpations d’identité dont il avait déjà été victime. Mais il a continué à donner des informations sur sa vie privée, sa vie professionnelle, sa vie sentimentale, bref tout ce qui permet à quelqu’un de connaître toute sa vie dans les moindres détails.

Dans cette affaire, l’usurpateur a flairé le bon filon. Il allait faire encore plus fort qu’usurper simplement l’identité de Tom A. sur internet ; il allait carrément incarner sa propre vie ! Cela a été très facile pour lui : il connaissait les moindres habitudes de Tom A. et il a pu se grimer exactement comme lui et adopter le même comportement grâce aux photos et vidéos que Tom publiait.”

Ce n’est qu’au mois de juin 2015 que l’usurpateur éveille les premiers soupçons, comme nous l’explique le policier Martial Ba :

“Au mois de février 2015, la mère de Tom A. nous avait signalé que son fils ne répondait plus ni au téléphone, ni chez lui. Mais comme notre enquête prouvait qu’il n’avait pas disparu, nous ne nous sommes pas posés d’autres questions et avons classé cette affaire immédiatement.

Mais plus tard, l’usurpateur commençait à éveiller les soupçons ailleurs : son compte en banque devenait débiteur de plusieurs centaines d’euros et le faux Tom se faisait très pressant auprès de ‘son’ employeur pour avoir des avances sur salaire conséquentes. C’est cet employeur qui nous a contactés pour nous signaler sa crainte face à l’attitude de plus en plus virulente de celui qu’il croyait Tom A.

Alors on a ouvert une enquête et on a découvert des mouvements de fonds financiers très louches : l’ensemble des fonds partait au Cameroun. Petit à petit, on s’est mis à douter de la véritable identité de cet usurpateur. On l’a donc convoqué et on s’est rendu compte qu’il ne s’agissait pas de Tom A. mais d’un usurpateur.

Ce qui nous a surpris, c’était son aplomb. Même face à l’évidence, il maintenait qu’il était Tom A. !”

Le lendemain, le vrai Tom A. est retrouvé dans une maison abandonnée à 30 km de Lyon.

L’usurpateur est actuellement incarcéré à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas, en attendant son procès qui aura lieu d’ici 3 mois. Il risque jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende pour usurpation d’identité, et jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle pour enlèvement et séquestration.

Alors, pour éviter un destin à la Tom A., protégez vos comptes sur les réseaux sociaux !